Vous avez pu lire dans les articles précédents l’histoire des Tisseurs, leur raison d’être, leurs motivations, actions, projets. Après cette plongée au coeur du collectif, j’avais envie d’avoir une vision extérieure. Didier Dufour, maire de Lezennes, ville dans laquelle les Tisseurs d’Oz tissent leurs liens, a accepté de m’en livrer sa perception.
Un état d’esprit collaboratif
Didier Dufour – C’est une relation subtile qui s’est mise en place avec les Tisseurs. Il n’y a pas d’un côté les Tisseurs et de l’autre les élus. A l’époque des débuts de l’aventure, j’étais adjoint au maire et c’est en tant qu’habitant que je me suis joint au collectif.
A l’origine, il y avait un noyau dur constitué d’amis et de proches. Tous se connaissaient bien, certains s’étaient rencontrés via l’association des parents d’élèves de l’école, d’autres travaillaient à la médiathèque, agissaient dans des associations locales ou étaient élus. Nous nous sommes retrouvés ensemble avec l’envie partagée de développer le lien social au sein de notre commune.
Nous laissions à l’entrée nos costumes de représentation sociale, nous étions là pour mettre nos compétences et talents au service du collectif. J’étais donc Tisseur en tant que citoyen de ma ville, mais aussi adjoint au maire. Lorsque le collectif a eu besoin de locaux et de matériel pour mener à biens ses actions, j’ai naturellement repris ma casquette d’élu pour demander des moyens à la mairie, qui ont bien sûr été alloués.
Une volonté affirmée de rester en dehors du champ de l’action politique
DF – Je me souviens qu’au début les Tisseurs interrogeaient. Leurs actions allaient plutôt dans le sens du respect de l’environnement, de l’économie sociale et solidaire. Certains se demandaient si cela ne pouvait pas prendre une tournure politique au sens « politicien ». Les Tisseurs d’Oz ont toujours affirmé leur volonté d’être apolitique. Cela a permis une coopération transparente avec la municipalité.
Qu’apporte un tel collectif à votre ville ?
DF – Je n’ai pas d’indicateur de mesure, je ne peux parler que de ce que je ressens en tant qu’élu. D’une manière générale, les Tisseurs ont contribué à réduire un certain nombre d’écarts, à relier les habitants les uns aux autres dans un état d’esprit bienveillant, coopératif et de dialogue. Ils portent aussi au devant de la scène des sujets importants du développement durable plébiscités par les habitants et la municipalité, encourageant ainsi une mobilisation générale.
Plus précisément, les Tisseurs sont un catalyseur pour ceux qui ont envie de se mobiliser. Ils ont deux grandes forces principales : une envie contagieuse de contribuer et leur caractère informel qui les rend libres. L’absence volontaire de structure (ils ont décidé de ne pas se constituer en association) et la liberté d’engagement (chacun s’engage quand il veut, comme il peut) sont leurs limites assumées. Ils sont parfois dépassés par le succès de leurs actions, même s’ils réussissent à toujours trouver des solutions, et sur le long terme, seuls, ils pourraient avoir du mal à être visibles. C’est là que la municipalité peut prendre le relais ou du moins apporter des moyens pour amplifier leur action.
Les Tisseurs d’Oz, un booster de projets
DF – Depuis environ une dizaine d’années, la mobilisation n’est plus politicienne, mais plutôt majoritairement citoyenne. Les Tisseurs contribuent à renouveler les mobilisations.
Les Tisseurs ont un effet revitalisant pour la ville. Je pense qu’ils ont un impact positif sur les nouveaux arrivants, car ils contribuent à donner une image de la ville en adéquation avec les problématiques de son temps.
Les Tisseurs ont enfin un effet émulsifiant, ils boostent les projets. La municipalité est en train de travailler sur un projet de tiers lieu, un espace partagé par tous les acteurs et habitants de la ville, comme un terreau fertile pour faire éclore leurs projets. Cela pourrait être un écosystème intéressant pour les Tisseurs, car un endroit où être visibles, où partager les ressources et les idées.
Secouez le monde ! 