Tonia Leccese : se remettre en question pour repartir

Sophie Mayeux – décembre 2012

Comment se représenter la championne du monde de boxe française de moins de dix-huit ans ? C’est une jeune femme surprenante. Très mature, certainement en raison de son statut de sportive de haut niveau. Féminine, elle est bien loin de l’image du garçon manqué que l’on pourrait avoir d’elle. Equilibrée, elle a un regard lucide sur elle-même. Franche, elle campe son regard dans le vôtre et va droit au but. D’un engagement sans faille pour son sport, Tonia répond toujours présente pour revenir dans son club parler aux femmes de boxe. Sa victoire : le club de Lille compte aujourd’hui plus de licenciées que de licenciés.

Tonia et la boxe, c’est comme Obélix et la potion magique : elle est tombée dedans quand elle était petite. Tonia a démarré le sport dès son plus jeune âge. Ses parents pratiquent la boxe américaine. Très tôt, lorsqu’elle a cinq ans, sa mère l’entraîne. « Quand j’étais petite, la boxe c’était vraiment un sport de garçons, c’était « cogner ». J’étais différente, car la seule fille, la plus petite et la plus jeune ». Puis sa mère met en place un cours de boxe française ; naturellement sa fille la suit. Aujourd’hui, Tonia a un palmarès national et international à faire pâlir n’importe quel sportif.

La boxe française n’est pas un sport professionnel. Tonia suit donc un DUT en technique de commercialisation, filière sport de haut niveau pour lui permettre de pratiquer ses quatre entrainements hebdomadaires. Tout en restant humble, Tonia est bien décidée à tracer sa route. « Les personnes qui ont le melon n’imposent pas le respect, elles ne durent pas longtemps. L’humilité permet d’accepter plus facilement l’échec et rend capable de rebondir. Et si on n’a pas le mental, on ne peut pas continuer. A force de prendre des coups, je me remets sans cesse en question et c’est ce qui me rend forte. »

Tonia se bat pour faire tomber les préjugés et les stéréotypes qui ont la vie dure quand il s’agit de son sport. Elle est entraineur. Elle veut amener un maximum de femmes vers cette activité qui reste encore dans les esprits un sport d’hommes. « Quand une femme vient au club, je lui dévoile mon palmarès, je lui explique les valeurs que porte la boxe française, l’esthétisme, l’efficacité et l’éducation, je lui rappelle que l’on s’affronte dans le respect du partenaire en bannissant toute violence. Nous avons développé au club un cours de savate-forme. C’est un cours de boxe énergique en musique, chorégraphié, qui fait travailler tout le corps. »

Existe-t-il des différences entre hommes et femmes dans la boxe ?

« Quand un homme monte sur le ring, il sait qu’il est là pour se faire frapper. C’est ce qui lui permet d’accepter les coups. Une femme a plus de difficultés à accepter cette condition. Il m’est déjà arrivé, à l’entrainement, de me battre contre un homme bien plus lourd que moi. On sent la différence de poids. Les coups sont plus appuyés et l’homme est là pour cogner, pour faire mal. Je ne supporte pas cette violence gratuite. Cela me renvoie à la violence des hommes contre les femmes. »

Est-ce compliqué aujourd’hui d’être une femme ?

« Je préfère être une femme plutôt qu’un homme, car en tant que femme, on ne peut que progresser. En boxe, une femme peut faire son chemin à force de persévérance. En général, être une femme, ça nous permet d’aller plus haut. »

Mèneriez-vous votre action de la même manière si vous étiez un homme ?

« Si je me mets dans la peau d’un homme, je me demande si je ne ferais pas comme les autres hommes, je cognerais… Finalement, je me comporterais de la même manière qu’aujourd’hui dans mon sport. Je ne privilégie pas les hommes aux femmes, car elles sont au même niveau que les hommes en boxe. »

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