
Sophie Mayeux
Mathilde vous expose une nouvelle vision du travail. Jeune femme d’une trentaine d’années avec un sourire franc, elle a une détermination, une soif de transmettre et d’accompagner intense. Chief Happiness Officer avant l’heure, Mathilde a créé « le Bilan de Sens© », un outil pour donner un sens à sa vie.
Je contacte Mathilde sur les conseils de Lily Gros, ma petite fée joyeuse de l’audace interviewée en novembre 2017. Elle me dit : « Il faut absolument que tu rencontres Mathilde. Elle a créé le Bilan de Sens. Tu verras, c’est très CRAZY! ». Avec une présentation pareil, ma curiosité ne peut qu’être attisée. Le jour où je rencontre Mathilde, mon fils démarre son stage de troisième. Je lui explique CRAZY!, à quoi ça sert, ce que nous y racontons, comment je trouve des personnes à interviewer. Il me répond : « Waouh, je vais participer à une interview comme dans un journal ? Mais c’est trop cool ! ». J’adore la joie et la capacité des enfants à s’enthousiasmer et c’est vrai que je n’avais jamais vraiment imaginé CRAZY! comme un vrai média. Mais oui, soyons nous-mêmes audacieux, CRAZY! est un média.
Mathilde n’a jamais abandonné ses convictions
Mathilde m’explique qu’elle a toujours eu de l’intérêt pour tout ce qui touche au développement personnel. C’est dans le hasard de dîners avec les amis de ses parents qu’elle entend parler de cela. Elle allait fouiller dans les rayons du libraire, mais il y a une vingtaine d’années, le développement personnel était perçu comme quelque chose de très ésotérique. Mathilde persiste et coache ses copines adolescentes à l’internat. Elles avaient coutume de lui dire : « Tu envoies du positif. » Et ça leur faisait du bien. Mathilde continue sur sa lancée et montre de l’intérêt pour des études de psychologie. Première contrariété : elle est dissuadée de partir dans cette direction. Elle fera donc une école de commerce, mais en alliant l’humain et l’entreprise, elle y développe un fort attrait pour les cours de Ressources Humaines. Et lorsqu’elle recherche son stage, de nouveau, on la dissuade de partir dans cette direction, prétextant sa trop grande jeunesse et son inexpérience. Elle opte donc pour un poste en marketing en tant que chef de produit dans une entreprise qui fabrique des luminaires à Hong Kong, en stage, puis en contrat local. « Un jour, on m’a demandé de choisir la couleur d’un luminaire. Je me suis demandé à ce moment-là si ce job avait vraiment du sens pour moi. Je suis alors rentrée en France pour tout faire pour travailler dans l’humain. J’étais intimement convaincue que je pouvais apporter quelque chose d’innovant dans ce domaine. Ce premier poste à l’étranger fut toutefois une expérience très enrichissante ; j’ai notamment développé des compétences précieuses qui m’ont été bien utiles lorsque j’ai créé mon entreprise. »
Chief Happiness Officer avant l’heure
Nous sommes en 2008. « De retour en France, j’ai commencé à chercher du travail. Quand je voyais des offres d’emploi, je n‘étais pas en accord avec ce que je lisais, je ne savais pas expliquer pourquoi, mais la vision des ressources humaines ne me convenait pas. » Mathilde décide alors de suivre le programme AUDACE qui accompagne les créateurs d’entreprise puis plus tard de reprendre une formation de thérapeute en décodage émotionnel. Le projet de Mathilde à ce moment-là est de se lancer dans le conseil en ressources humaines avec un axe bien-être au travail. « J’ai confronté mon projet à différentes personnes, je me suis rendue compte que ce n’était pas le bon moment, les entreprises n’étaient pas encore prêtes à investir sur le bien-être au travail. » Mathilde décide alors d’intégrer un cabinet de chasse de têtes afin de vivre une expérience terrain. Puis elle fait une rencontre décisive en la personne d’un dirigeant de l’agence Altima à qui elle expose ses théories sur le bien-être au travail. Il décide plus tard de lui faire confiance et l’embauche en 2012. « J’ai passé 3 ans chez Altima. Cela a été une chance car j’ai vraiment pu développer plein de projets que j’avais en tête. Le recrutement, c’est avant tout une question de rencontre humaine. J’avais envie de connecter les personnes entre elles, de prendre en compte les envies de chacun avec humanité. J’avais mis en place des ateliers de sophrologie au bureau, des parcours de développement personnel pour fédérer les collaborateurs et faire durer ce qu’ils y avaient appris. On avait aussi lancé l’initiative du Pot Presque Parfait, sur l’idée du Dîner Presque Parfait, qu’une équipe devait organiser chaque mois. Je voulais que les salariés deviennent de vrais acteurs de leur vie dans l’entreprise. Aujourd’hui tout cela paraît très évident, mais 8 ans en arrière, le bien-être au travail était beaucoup moins, voire pas du tout pris en considération. » En 2013, Mathilde réalise que toutes ces initiatives ne suffisent pas à l’épanouissement d’une partie des collaborateurs : ils ne sont pas à leur place professionnellement. Elle décide alors de quitter Altima pour agir plus en amont et aider les personnes à trouver leur véritable vocation professionnelle. S’interrogeant sur la question du sens au travail et de l’orientation depuis déjà plusieurs années, elle met finalement sur papier sa méthode du Bilan de Sens en une après-midi. C’est le bon moment pour se lancer : elle est prête et un grand nombre de personnes attendent des solutions alternatives à l’orientation professionnelle.
Le Bilan de Sens© : accompagner avec empathie et sincérité chacun dans sa quête de sens
L’objectif de Mathilde est de toujours aller chercher le meilleur de chacun pour le mettre à la bonne place. Elle a observé que la réorientation professionnelle coïncidait souvent avec une réorientation de sa vie en général. Choisir un métier a un réel impact sur son style de vie. Pour Mathilde, il n’est pas concevable de dissocier les deux. Le Bilan de Sens est une méthode qui permet à chacun de trouver sa vocation professionnelle en se basant sur le passé, mais surtout sur l’avenir : à quoi la personne veut contribuer, ce qu’elle veut devenir. Et c’est Mathilde qui en parle le mieux.
« Aujourd’hui, toutes les personnes que j’accompagne sont en quête de sens. Le sens, c’est la contribution positive à l’être humain ou à son environnement. Je pense que le bilan de compétences tel que l’on continue de le diffuser aujourd’hui n’est plus adapté à la réalité de la vie actuelle et future, ni aux nouvelles aspirations des personnes, et n’aborde pas le sujet du sens en profondeur. Le bilan de compétences est un processus très normé et orienté comme son nom l’indique, sur les compétences, le parcours professionnel. On se base beaucoup sur des tests de personnalité, qui à la fin, vont vous mettre dans une case et vous proposer une liste de métiers adaptée à cette case. Durant mon Bilan de Sens, je questionne plus en profondeur, je m’intéresse sincèrement aux personnes en posant des questions qui ne font pas appel à l’ego. Le monde change, le monde du travail aussi. J’accompagne ceux qui le désirent pour vivre au mieux cette transition et réussir dans ce contexte leur vie professionnelle. »
Une nouvelle vision du travail : trouver une utilité à chacun dans la société
Mais Mathilde ne veut pas s’arrêter en si bon chemin, maintenant qu’elle est lancée ! Elle a une vraie nouvelle vision du travail, de sa répartition et voudrait que la société évolue sur ce sujet. Mathilde a à cœur de contribuer à remettre en adéquation l’offre et la demande de travail. Et lorsqu’elle me parle de cela, elle ne me parle pas que de faire baisser le taux de chômage, mais de mettre les personnes au bon endroit, d’inventer les métiers de demain, d’anticiper pour mieux orienter les jeunes, mieux reconvertir les salariés et mieux accompagner les entreprises dans leurs réorganisations. Elle m’explique tout cela avec passion.
« Le marché du travail est en pleine révolution. Et il va falloir accompagner cette révolution. Par exemple, l’utilisation massive de la robotique, de l’Intelligence Artificielle va avoir de forts impacts : des métiers vont être remplacés, et les collaborateurs devront apprendre à travailler en complémentarité avec les machines. Le revenu universel prendra alors tout son sens. En effet, je pense qu’il ne sera pas possible de fournir du travail tel que nous l’envisageons aujourd’hui (en entreprise par exemple) à tous. Cependant, d’autres formes de travail sont possibles, comme le travail d’intérêt général : par exemple, avec le phénomène de vieillissement de la population, il sera de plus en plus nécessaire d’aider les personnes âgées. Les entreprises licencient et ne peuvent pas retrouver en leur sein une mission à chacun. Cependant, elles ont la responsabilité sociétale de s’assurer qu’elles mettent en place les moyens nécessaires pour que les salariés licenciés retrouvent un sens à leur vie, et ainsi soient en mesure de se repositionner sur le marché du travail. Aujourd’hui, la seule solution qu’on leur propose, c’est l’inscription et le parcours Pôle Emploi, et on voit bien que ça ne marche pas.
De même que nous avons une « fiche » à la Sécurité Sociale, nous devrions tous avoir une fiche qui répertorie nos compétences et talents, comme une base de données géante de « free lancers ». Celle-ci permettrait de relier les personnes et les employeurs entre eux, afin de mettre les bonnes compétences au bon endroit. Les barrières géographiques pourraient tomber avec le développement du télétravail. »
Mais revenons à l’outil Bilan de Sens. « Aujourd’hui, le Bilan de Sens est réservé aux personnes qui peuvent se l’offrir. Cela fait 5 ans que je pratique le Bilan de Sens, et je voudrais le rendre accessible au plus grand nombre, car je constate qu’il fait vraiment sens. Pour les petits budgets, je vais déjà proposer le questionnement via des outils en ligne. J’analyserai ensuite les réponses moi-même, car comme nous l’avons déjà vu, les questions du Bilan de Sens contrairement aux tests de personnalité sont des questions ouvertes et les réponses sont donc développées. II est nécessaire de les analyser et de rédiger ensuite une synthèse, puis de « récupérer » la personne en coaching individuel. D’ici quelques années, je compte sur l’Intelligence Artificielle pour m’aider dans le développement de ce processus. Je travaille déjà sur ce sujet passionnant d’associer l’IA au service de l’humain avec éthique pour rendre ce type d’outils accessible au plus grand nombre. » Le rêve secret de Mathilde est que chaque Français puisse avoir ainsi accès à un Bilan de Sens, d’amener les enfants à réfléchir dès l’école primaire sur ce qui les touche dans la vie, puis de leur permettre de tester cette sensibilité dans des actions (professionnelles, associatives…) afin de devenir des adultes qui se sentent bien à leur place dans la société et ainsi prêts à lui donner le meilleur d’eux-mêmes.
Dans quelles lettres de CRAZY! Mathilde Forget se retrouve-t-elle ?
Mathilde me répond comme un cri du cœur : « moi c’est audacieux ! ».
« Il faut toujours pousser les murs. On me dit que ce n’est pas possible ? Eh bien j’y vais. Dans tous les domaines de ma vie, j’ose faire différemment, sortir du cadre, j’ose trouver de nouvelles manières de faire, car je vois bien que celles qui existent aujourd’hui ne marchent pas forcément. »
Je laisse Mathilde conclure. Un vrai coup de boost positif : oui, les solutions existent et elles sont en nous. « Je suis convaincue que nous avons tous quelque chose de positif à apporter à la société. Et j’œuvre à faire émerger cela en chacun d’entre nous. Arrêtons de suivre les chemins tracés. Il n’y a pas un chemin unique. Cela fait 40 ans qu’on fait toujours la même chose en terme de reclassement social et réorientation professionnelle. Aujourd’hui cela ne fonctionne plus. Acceptons que le monde change, que nous ne connaissons pas les métiers de demain. Devenons acteurs du monde et proposons une nouvelle vision du travail. Les solutions au chômage et aux nouvelles organisations du travail ne viendront pas de l’Etat. C’est à chacun d’entre nous d’avoir un impact.
Apporter aux autres est le meilleur sens que l’on puisse donner à sa vie et c’est celui que j’ai choisi. Si chacun d’entre nous décide de se centrer sur ce qu’il peut apporter aux autres, alors, chacun aura une meilleure estime de soi, il y aura moins de soucis de conflit et un cercle vertueux pourra alors se mettre en place. Oui, ça va bouger dans les années qui viennent, dans les entreprises et dans la société, et au final pour du positif. J’en suis convaincue. »
Plus d’informations : www.mathilde-forget.com
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Un commentaire sur “Mathilde Forget : une nouvelle vision du travail, permettre à chacun d’avoir une utilité dans la société”