
Je profite de l’été pour préparer deux nouveaux portraits qui paraîtront à partir de la rentrée. Après celui de Marjorie et Christophe, je vous proposerai celui d’un collectif spontané de citoyens à Lezennes et d’une société de l’économie sociale et solidaire en train de s’envoler afin d’explorer des solutions concrètes pour construire ce fameux monde d’après la crise. J’ai en tête d’aller sur la piste de l’enseignement et de la culture aussi.
L’été est un moment propice à la prise de recul. Comme beaucoup, j’ai rêvé pendant le confinement. J’ai rêvé que l’on serait capable de prendre des décisions radicales pour transformer le monde.
On s’était dit que
l’on ferait de la politique autrement en redonnant sens et contenu au mot « démocratie »,
l’on consommerait différemment en s’orientant vers une consommation plus mesurée, responsable et locale,
l’on prendrait le temps, le temps de s’occuper de nos proches, faire de bonnes choses à manger, ralentir le rythme de nos vies effrénées,
l’on polluerait moins car on avait redécouvert une nature qui commençait à respirer de nouveau avec l’arrêt de l’activité humaine.
On s’était dit plein d’autres choses…
On avait redécouvert la solidarité, la générosité, le sentiment de se sentir reliés les uns aux autres, lu les propositions de Nicolas Hulot pour le climat, bref, on c’était dit qu’on ne recommencerait pas les mêmes erreurs.
Quelques mois plus tard
Quelques mois plus tard, je ne vois pas vraiment de décisions radicales prises par quelque gouvernement, ni nouvelles propositions pour nous refaire aimer la politique, (il suffit de regarder le taux d’abstention aux récentes élections municipales), ni décisions dans le domaine écologique. Je souhaite qu’enfin l’on prenne en compte la planète dans sa globalité à chacune de nos décisions, que ces dernières prennent en compte la nature, le territoire, la culture, les habitants, les citoyens, les êtres humains, et non pas les intérêts de quelques uns. Je ne veux plus paraître utopiste lorsque je dis cela, mais je veux qu’il devienne normal de réfléchir ainsi.
Alors on baisse les bras ?
Ce n’est pas le moment. On les relève, on se remonte les manches encore plus haut. Les chantiers de la transformation sont vastes certes, ils font peur car plus rien n’est sûr, ou plutôt, ce qui est sûr, c’est que tout est incertain. Mais n’est-il pas passionnant de mener tous ces chantiers qui nous emmènent vers une autre voie ? C’est avec Edgar Morin que je reprends espoir cet été et cette citation extraite de son livre.
« Si tu ne l’espères pas, tu ne trouveras pas l’inespéré » – Héraclite
Changeons de Voie
Ce n’est pas un secret, j’aime Edgar Morin, j’aime cet homme à la pensée complexe et humaniste, j’aime cet homme qui à 99 ans ne baisse surtout pas les bras et nous propose de changer de Voie. En penseur concerné par son temps, il a écrit cet essai, Changeons de Voie, sur les leçons à tirer de la crise du Coronavirus, dressé la liste des défis à relever, et formulé des propositions afin de nous engager vers cette autre Voie. Toutes ses propositions prennent leur source dans le phénomène de la régénération, régénération de la politique, de l’écologie, de la civilisation, de l’humanité. Nous avons tout asséché et déshumanisé : notre Terre, nos manières de consommer, travailler, aimer. Nous avons petit à petit retirer tout humanisme de notre vie. Il est temps de reconstituer ce que nous avons détruit.
Je vous conseille cet ouvrage très accessible. Si nous ne pouvons pas directement influencer gouvernants et décideurs, nous avons le très grand pouvoir de nous transformer personnellement. Et Edgar Morin nous en livre les clés. Il nomme cela la « réforme personnelle ».
« connaître selon la connaissance complexe qui relie les savoirs pour concevoir les problèmes fondamentaux et globaux ;
penser selon la raison sensible, qui effectue la dialectique permanente raison/ passion ;
agir selon l’impératif éthique premier de responsabilité/solidarité ;
vivre selon le besoin poétique d’amour, de communion et d’enchantement esthétique.
Les buts de l’humanisme, en somme, doivent se réaliser en chacun. »
